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  • God save the Queen
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    Le dragon protecteur d'Yggdrasil s'est réveillé. Au milieu du mariage de Gaston et Camélia, souverains d'Altissia et Caldissia, la statue figée depuis un millénaire a quitté son socle pour arpenter le ciel de la cité. De son rugissement puissant, il a fait appel à des monstres sauvages pour encercler Yggdrasil, rendant les entrées et sorties en son sein impossibles. Progressivement, les vivres viennent à manquer et les stocks se vident sans pouvoir se remplir...
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    Imbéciles répugnants et arrogants, tous autant qu'ils sont.
    Mes doigts tapent sur le dessus de la table avec régularité, comme si cela allait me débarrasser de mon énervement alors que je sais pourtant que cela n'aura aucun effet. Les sourcils froncés, le regard traversé par des éclats d'agacement et de colère à peine contenue, je ressasse sans le vouloir ce qui s'est passé il y a tout juste quelques heures, inlassablement. Il fut dur de rester inflexible. Je serrais tant mes doigts entre eux que je me serais cru capable de briser mes propres os, à ce stade. En même temps, comment étais-je supposé réagir face à leurs élucubrations ? Il m'a fallu tout le contrôle du monde pour ne pas les envoyer au cachot. Je l'avais vu venir. Dès lors qu'ils avaient mentionné l'idée d'une « alliance avec la haute-nobless », j'avais compris que leurs petits minaudages n'étaient destinés qu'à amener l'idée d'un mariage dont je serais le protagoniste. Un mariage avec l'un ou l'une de leurs rejetons, quel qu'il soit, du moment qu'iel prenne la couronne qui était celle de ma mère. Et la pensée avait remonté une rage si intense dans mes tripes que je n'avais dû mon calme qu'à la présence de Samaël au bout de la pièce.

    L'idée m'avait toujours révulsé, il faut dire. Même du temps de mon père, qui avait toutefois trop peur que cela ne me donne une quelconque forme de pouvoir pour le concrétiser, espérant un jour trouver un parti qui l'avantagerait davantage. Il était mort avant, au final. Dommage pour lui. Il semblait, néanmoins, que l'idée faisait toujours son chemin parmi ces incapables de nobles et de religieux que je suis toujours obligé de supporter, pour l'exemple. Réalisent-ils la chance qu'ils ont déjà eu de survivre après leur ancien souverain... ? Je regrette, parfois, qu'ils n'aient pas été présentés, ce jour-là. Quand bien même une part de moi y renacle... N'aurait-ce pas été un gain de temps ? La pensée me travaille de plus en plus.

    « Imbéciles. »

    Je marmonne, mon regard ne réussissant pas à se fixer sur la carte que je m'efforçais d'essayer de saisir. J'avais déjà du mal à me concentrer, avant qu'ils ne me haranguent avec leurs questions stupides. Ma tête était lourde et des vagues récurrentes de nausées remontaient jusque dans ma gorge. Fort heureusement, mon état n'est pas encore visible à l’œil nu, mais il commence à devenir handicapant pour supporter ces anneries. Et... Quelque part, c'est un compte à rebours on ne peut plus ironique, quelque part. Tous ces idiots n'attendaient pourtant que ça, que mon ventre s’arrondisse. Mais pas nécessairement du fait de la personne concernée, au final.

    « Entrez. »

    Je souffle pour me détendre, quand bien même la présence qui s'est avancée m'aide à l'être davantage, même inconsciemment. J'ai attendu un peu, avant de le faire appeler. Je devais prendre quelques précautions. Sa nomination comme Général, en plus de la réputation qu'il a obtenu suite à son « haut-fait » (notre méfait, plutôt) a suscité quelques vives jalousies au sein de la noblesse, déjà à cran du fait de mes refus face à leurs propositions de plus en plus enhardies. Mon père est mort depuis bientôt deux mois. Ne pourraient-ils pas attendre.... ? Je sais, toutefois, que c'est justement à cause de ça, qu'ils s'inquiètent et cherchent à me coincer dans une alliance de ce genre. Car ils craignent d'être les prochains. Là-dessus, ils ne sont pas entièrement stupides, pour une fois. Toutefois, j'ai eu une autre idée. Une qu'ils détesteront, mais qui me sied bien davantage.

    « Mes excuses, je devais prendre quelques précautions. »

    Même si mon visage est marqué par l'agacement et la fatigue que je ne cherche pas à dissimuler, la raideur de mes traits se défait légèrement lorsque je l'observe. Mon expression se fait plus douce. Malheureusement, nous avons eu bien peu de temps pour parler et pour nous voir, dernièrement. Il n'y avait que des bribes ici et là, que des courts instants ne dépassant pas la demie-heure en privé, quand ce n'était pas mon état qui me rendait souffrant. Là, j'ai pu profiter de l'aide de Mikaël, qui me devait bien cela. Mais ce n'est pas pour rien.

    « Je voulais... M'entretenir avec vous. Puis-je vous prendre un peu de temps ? »

    Je suis plus aimable que tout à l'heure, déjà. Il faut dire que sa présence me soulage, même indirectement. Aujourd'hui, j'en ai bien besoin.

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    Deux mois se sont écoulés depuis la mort de Kazuo et le couronnement de Natsume. Deux mois qui sont passés à une vitesse vertigineuse. Mais voilà, maintenant qu'on a un roi, le trône de la reine demeure inoccupé à ce jour et cela tend à inquiéter les nobles qui craignent qu'un héritier ne vienne pas à temps pour remplacer son père le jour où ce dernier disparaîtrait. Des préoccupations qui agacent la cour royale et les conseillers qui ne manquent bien sûr pas de noms (de préférence les leur) pour proposer des prétendant.es à la pelle en espérant que l'un.e d'eux trouvera grâce aux yeux du monarque. Ils ignorent tous que je suis déjà passé par là et que la place, en son cœur, est déjà réservée. Je rirais bien moi-même de leur manque d'information à ce sujet s'ils ne m'avaient pas énervé à force d'insister à ce point. D'autant que je ne sais pas non plus quelle décision Natsume prendra à ce sujet, pour être honnête. Si nous sommes amants, rien ne l'empêche de quand même se marier pour la forme afin de taire les ragots et de calmer son entourage. Et même si l'idée ne m'enchante clairement pas, je sais qu'il ne possède pas autant de libertés qu'il souhaite, alors... Je comprendrais. Pour lui, pour qu'il soit tranquille, je me plierai à la volonté qu'il lui correspond le mieux, même si ce sera douloureux à supporter. Mais c'est bien parce que Natsume était présent que je me suis retenu d'étrangler quelques personnes durant la réunion d'aujourd'hui.
    Je ne l'ai pas fait attendre d'ailleurs quand il a demandé à m'entretenir avec lui seul à seul dans la salle du conseil. J'étais moi-même pressé de le revoir, conscient que cette réunion n'avait pas été de tout repos particulièrement pour sa part. J'espère parvenir à le détendre un peu, par mes mots ou ma présence. Lorsque je rentre dans la pièce, je fais attention à bien refermer la porte derrière moi pour être certain que nous soyons tranquilles. Je m'avance ensuite vers lui, faisant fi de ses excuses qu'il n'a pas à me donner, car je lui appartiens corps et âme et existe pour le servir de toutes les manières possibles.

    « Mon temps vous est entièrement dévoué. »

    Ma main vient chercher la sienne pour la prendre et y déposer un baiser tendre pour lui témoigner mon affection toujours présente et pour l'apaiser, avant de la relâcher.

    « Comment puis-je servir mon roi bien-aimé ? »

    Je me permets de supposer d'ailleurs que ça a quelque chose à voir avec tout à l'heure, mais je me trompe peut-être.

    « Est-ce à propos de tout à l'heure ? Voulez-vous que je me débarrasse des impertinents qui osent se mêler de votre vie privée ? »

    Il n'a qu'un mot à dire, j'accours. Qu'un ordre, et ce sera fait, pour punir les sceptiques de leur arrogance.

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    Mes épaules se détendent. Assis sur mon siège, si je ne bouge pas, je le laisse prendre ma main sans reculer, bienheureux de profiter de sa douceur après ces longues discussions qui m'ont rendu hargneux. Dans un souffle, j'expire et laisse mon regard se perdre dans mes traits, laissant ce dernier s'emplir d'une affection que je dois dissimuler en temps normal. Sa dévotion rend pourtant la tâche difficile. Ce n'est pas le seul, en soi, à me faire ce genre de grandes déclarations : mais c'est bien le seul que je crois. C'est le seul qui n'y a jamais rien gagné. Le seul qui me sert par simple et pure affection. Le seul auquel je fais totalement confiance, quand bien même on pourrait douter de la cohérence de mes choix.
    Je ne m'étonne pas qu'il n'ait pas compris mes intentions. Et je ne le blâme pas pour ses propositions qui feraient bondir n'importe qui, que je prends comme des marques d'affection alors que nous parlons pourtant de meurtres. C'est-à-dire que quelque part, je me dis aussi que ces crétins ne manqueraient pas à l'univers. Je n'ai pas de désir particulier de tuer, mais... Eh bien. Je dis juste que ce ne serait pas une grande perte. Mais ce n'est pas le sujet d'aujourd'hui.

    « Rien de tout ça. Asseyez-vous avec moi. »

    Je tire distraitement le siège à mes côtés pour l'inviter à s'asseoir. Celui, normalement, dédié à la reine. Je me garde toutefois de faire un commentaire à ce propos, attendant qu'il s’assoit pour reprendre la parole. Ma main se lie à la sienne.

    « Je voulais... Discuter avec vous de mon état, et d'autres choses. »

    Je ne vais pas dire que je suis enchanté d'être enceint, ce serait un grossier mensonge. Devenir roi puis père si vite n'était pas spécifiquement dans mes plans ; toutefois, les choses ont tourné ainsi. Pour autant... Pour autant, cela m'a obligé à réfléchir. Cela m'a obligé à considérer le futur et à me mettre devant des décisions à prendre. Je lâche un soupir, le regard se faisant plus sérieux.

    « Je voudrais... »

    Je m'arrête un instant, comme si je pesais mes mots. Non, je ne dois pas être trop direct, même si c'est ce que je juge le plus pertinent factuellement. Je me force à prendre du temps, ne serait-ce que pour comprendre comment lui perçoit les choses. Il a trop tendance à se cacher derrière mon avis. Et je veux son opinion.

    « Avez-vous... Pensé à tout ça, entre temps ? A notre... Situation ?»

    Je lui demande son avis car je l'estime. Je l'estime plus que tout. Peu importe ce que cela dit sur moi.

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    Je ne dis rien lorsqu'il me demande de s'asseoir à ses côtés même si je reconnais le fauteuil qu'il m'adresse. Celui de feu la reine Miyu dont le siège n'a pas été occupé depuis sa mort. Le sait-il ? Sûrement. Puisqu'il me l'indique quand même, je hoche brièvement de la tête et m'exécute sans poser de question. Cela me fait toutefois étrange de me trouver dessus alors que je suis d'ordinaire dans un coin de la salle, me tenant prêt si jamais une réunion viendrait à tourner au vinaigre pour une raison ou pour une autre. Heureusement nous en avons échappé pour l'instant, mais nous ne sommes jamais trop prudents. Sa main, chaude contre la mienne, me détend toutefois et fait dessiner un sourire doux sur mon visage, que je ne réserve qu'à lui.
    Au début inquiet quand il parle de son "état", car je crains qu'il ne soit tombé malade et qu'il ne m'en ait pas parlé, j'attends néanmoins qu'il poursuive, même si je me trouve à présent un peu nerveux. Il semble hésiter, prendre son temps... pour au final aborder notre situation. Je me relaxe un peu, ayant cru un instant qu'il allait m'annoncer quelque chose de très dramatique.

    « Oh... »

    Ça va, c'est moins grave que je ne l'imaginais. Même si je me demande ce qu'il veut dire par là. Est-ce que quelque chose le trouble ?

    « Notre situation... Vous voulez dire... Notre relation, par exemple ? »

    Ou alors... Parle-t-il de sa grossesse ? A-t-il pris une décision là-dessus ? Je vais le laisser m'en parler s'il le souhaite. Pour l'heure, en ce qui concerne nous deux...

    « En tout cas j'y pense... Assez souvent. »

    Mes joues prennent de légères couleurs.

    « Difficile de ne pas le faire, puisque je vous vois tous les jours. »

    Un petit rictus amusé m'échappe. Notre relation, je n'y pense en soit pas plus que ça. Lui en revanche... J'y pense. Tout le temps. Le roi est dans mon esprit en permanence. J'ignore quelle réponse il attend, cependant.

    « Mais... Je ne me suis pas forcément... posé plus de questions que ça. J'attendais un peu de voir comment les choses se déroulaient. Comment... vous, vous voyiez les choses. Vous n'avez pas la position la plus simple. »

    Je me suis promis de me plier à sa volonté, même si elle s'avérait douloureuse à accepter. Mais il est celui dans la situation la moins favorable, alors je me dois, pour lui faciliter la vie, ne pas me montrer trop capricieux même si cela ne me dérangerait nullement de faire tomber quelques têtes si cela peut me permettre d'être auprès de lui.

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    Il semble comprendre avec lenteur, mais comprendre tout de même. Si ces lenteurs m'agaceraient chez un autre, j'ai tendance à en profiter quand il s'agit de lui, observant avec attention la manière dont les traits de son visage se bougent, comme si il s'agissait d'un spectacle à part entière. Le bord de mes lèvres s'arque en une moue mêlant désabus et amusement. J'aurais cru que c'était évident. Toutefois, il finit par en venir au point, quoique partiellement. Je glousse devant son aveu, en ayant témoigné malgré le fait que je peinais à comprendre la raison ; même Mikael m'avait fait la remarque sur le fait que les yeux de mon général se perdaient souvent, en conseil. Je mentirais si je disais que je n'en tirais pas un certain orgueil, voir de l'amusement.

    « Je sais bien. »

    Je me garde d'un autre commentaire, quoique mon ton rieur en dit assez là-dessus. Je suis toutefois presque déçu qu'il me dise qu'il n'a pas réfléchi davantage à toute cette faire. Suis-je vexé ? Peut-être un peu. Mais je ne lui en veux pas tellement, puisque je reconnais là sa volonté de bien faire et de ne pas me marcher sur les pieds. Un tempérament qui me plaît et me déplaît, principalement car j'aimerais qu'il cesse d'agir comme mon subordonné. Ce qu'il est encore. Ce que je ne veux plus qu'il soit. Et vu qu'il aborde mon avis, je vais devoir y arriver. Je soupire un peu. C'était prévisible.

    « A vrai dire... »

    Je ne lui mens pas. Pas à lui. Et si je pourrais amener mon propos d'une manière plus délicate, je choisis de ne pas le faire. Mon regard se repose sur lui, plus sérieux mais sans sécheresse, comme si je faisais une simple constatation.

    « A vrai dire, l'idée de me marier ou d'avoir des enfants avec quelqu'un d'autre que vous me débecte au plus haut point. »

    Car ça l'est. C'est simple. Tellement simple que cela m'est apparu presque immédiatement lorsque j'y ai pensé, lorsque ces crétins m'ont harangué avec les noms de leurs progénitures. Comme si n'importe lequel d'entre eux arriveraient à sa hauteur. Je ne pouvais pas tolérer une autre image que la sienne.

    « Je ne peux toutefois vous imposer un tel fardeau. Et... Vous n'ignorez pas qu'une telle décision susciterait quelques mécontents. »

    Des crétins incapables que je ne serais pas malheureux de voir disparaître, mais qui seraient sûrement furieux d'avoir été ainsi « doublés ». Se sentiraient-ils alors pousser des ailes pour quelques traîtrises... ? Peut-être. Je sais que mon général y risquerait sa vie. Néanmoins...

    « Mais... »

    Je prends davantage de précautions. Je ne peux pas l'obliger. Je ne veux pas le forcer à accepter une position, même avantageuse, qu'il ne voudrait pas. Mais je suis assez égoïste pour exprimer l'envie qui est venue jusqu'à moi et que je ne veux pas repousser.

    « Si je vous proposais de vous asseoir à mes côtés et de m'épouser, vous... Accepteriez-vous ? »

    Je relève le regard pour lui, devenu sérieux. Je ne plaisante plus. Je sais ce que je veux. Peu importe ce que pensent ces imbéciles, dehors. Si je veux changer ce pays, je ne peux pas le faire en m'inquiétant de leurs caprices, au contraire. Il est temps, aussi, qu'ils comprennent une chose : quand il s'agit de Samaël, je ne cèderai pas d'un pouce.

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    Démasqué, mes joues rosissent légèrement. J'espère qu'hormis lui, les autres n'ont pas remarqué comme j'avais tendance à le fixer un peu trop intensément... Oh et puis bon, qu'est-ce que ça change, qu'ils le découvrent ? Ils sont déjà bien assez embêtants comme ça. Par la suite, même s'il exprime un sentiment de dégoût, je suis flatté qu'il ne s'imagine pas se marier ou avoir des enfants avec quelqu'un d'autre. Mon cœur bat chaudement dans ma poitrine, acceptant le compliment même si j'ignore où il veut en venir en abordant ce sujet-là. C'est agréable de l'entendre, bien sûr, mais...
    Est-ce que ça veut dire qu'il ne serait pas contre l'idée de...
    De m'épouser. Je me dis que c'est ridicule que je pense ça, qu'il ne me ferait jamais une telle demande. Pourtant mon rythme cardiaque s'accélère tout à coup quand il me parle d'un éventuel "fardeau". Quel... fardeau ?.. Celui d'être son amant ? Mais j'en suis ravi, au contraire. Rien ne peut me faire plus plaisir que de demeurer à ses côtés.
    Son expression des plus sérieuses se relève vers moi. Je me fige aussitôt quand, enfin, il expose l'idée à laquelle il réfléchissait. Et mon sourire se fane. Mon corps se fige d'une traite. Je cligne des yeux d'une manière idiote, comme si j'avais rêvé les mots qu'il vient pourtant de prononcer. Mon cœur rate un battement. Peut-être plusieurs. Cette demande... Je ne pouvais pas demander mieux.

    « Vous... Voulez... ? »

    Mon visage prend feu. Sur mes pommettes, des teintes rouges s'y apposent, signes de mon embarras, de ma surprise... et de ma joie. Gêné que mon côté timide ressurgissent tout à coup, trop choqué pour vraiment lui donner une réponse alors qu'au fond de moi elle est évidente, j'en viens à cacher une partie de mes joues avec ma main, mes yeux le fuyant au risque de devenir une véritable bouillotte.

    « Je... J-Je... Je ne sais pas quoi d-dire... »

    Si. Si, je sais quoi dire. Mais comment le dire ? Est-ce que je veux l'épouser ? Quelle question. Evidemment. Tout comme lui, je ne voudrais me marier à personne d'autre. Je ne voudrais vivre avec personne d'autre. Il n'y a que lui dans mes pensées. Que lui dans mon cœur. Que lui à qui je suis aussi dévoué. A qui je donnerais ma vie sans hésiter. Mon roi. Le seul. Me voilà pourtant tout timoré et transi alors que je prends conscience, lentement, sûrement, de ce que cela impliquerait par rapport à mon statut.

    « Mais... Par rapport à votre position ? Ce ne serait pas embêtant ? Et... Et... Je ne suis pas bon diplomate !.. Du tout ! Je vais être catastrophique, je... je... Je vais vous faire honte et... Et vous allez peut-être regretter... »

    On pourrait peiner à croire que j'ai porté à Kazuo un coup fatale et sanglant. Le chevalier qui a tué ennemis de son souverain se trouve comme un adolescent amouraché en sa présence, incapable de répondre à une simple demande dont il sait pourtant le résultat.

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    Je ne m'attendais pas à une pareille surprise de sa part. N'y avait-il pas songé... ? On dirait que non.  Si je garde le silence, c'est car j'observe sa réaction. En temps normal, sûrement m'amuserais-je beaucoup de sa timidité soudaine quand je l'ai connu bien plus audacieux avec moi ; mais je ne cherche pas à jouer avec lui. Du peu que j'observe, du moins... Sa réaction n'est pas négative. Il semble plus embarrassé qu'autre chose, comme si je venais de l'inviter à aller conter fleurette dans un champ de fleurs (ou ce genre de chose de livres d'amour courtois, je ne m'y connais pas énormément). Dubitatif, mon œil se fait curieux. Il proteste, mais je ne crois pas... Que ce soit de vraies protestations. On dirait plus... Des excuses. Et je m'agace un peu de ses affirmations que je trouve très péremptoires, fronçant les sourcils sans perdre mon air sérieux.

    « Ce n'est pas d'un diplomate, dont j'ai besoin. Sinon, j'épouserais n'importe lequel de ces imbéciles qui se pressent à la porte. »

    Et il y en a. Des frissons de dégoût remontaient dans mon dos à chaque fois que j'étais témoin de leurs avances lors des nombreuses réceptions que j'ai dû faire tenir après mon couronnement, pour brosser le poil de la noblesse. Il me fallait toute ma maîtrise de moi-même pour ne pas vomir. Alors en effet, j'avais le choix. Largement. Pourtant, je refuse de croire qu'il pense sincèrement ce qu'il me dit. Ma main libre vient se porter sur son visage pour le forcer à  croiser mon regard devenu inflexible.

    « Est-ce que c'est ce que vous voulez ? Que j'épouse un de ces idiots ? Que je l'embrasse et le laisse partager mon lit ? Que je porte un de leurs enfants ? »

    Toutes ces hypothèses me hérissent rien qu'à les énoncer. Pourtant je veux les dire pour qu'il les entende et pour voir son expression lorsque je les exprime. Mon expression reste sérieuse et mon ton stagne, mais mes traits s'adoucissent.

    « Je n'ai pas honte de vous. C'est bien... C'est bien car je ne veux plus vous cacher, que je vous fais cette demande. »

    Je sais que ce n'est pas usuel. Ma famille a habitué le pays à des mariages tournés vers la haute-noblesse afin de s'assurer de son obéissance. Un mariage avec un représentant de l'armée, je crois que... Je crois que ça ne s'est pas fait depuis six générations, au moins, et encore, dans une branche annexe. Je sais que cela provoquera des crispations, mais je peux tolérer de le garder de côté, dans l'ombre, comme si j'avais peur des réactions. Hors de question de courber l'échine à nouveau. Puis, au delà de tout ça...

    « Je souhaite un partenaire. Et je ne peux en imaginer d'autre. »

    Ma main se serre dans la sienne. J'ai besoin de quelqu'un qui m'accompagnera, quoi qu'il arrive. Qui me suivra et saura en même temps me compléter. Avec qui je peux imaginer commettre le pire comme le meilleur. Dans le fond, c'est ça, qui m'a convaincu. Je fus convaincu le jour même où il avait choisi de tout abandonner pour me sauver d'une blessure de plus ; au moment où nous nous étions battus ensemble tout en veillant l'un sur l'autre. Au moment même où sa main s'était fermée contre la mienne pour abattre cette épée dans un coeur et nous libérer. Je le savais, dès cet instant. Je souhaite simplement corriger un tort que j'estime avoir commis en le dissimulant de cette manière, et qui a trop duré.

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    Je devrais être heureux. Plus que ça, même. Et je le suis. Je le suis bien assez. Ce fut dans mes rêves d'idéal d'un jour me marier avec la personne que j'aime. Lorsque Kazuo a pris le pouvoir et a commencé sa tyrannie, mes projets furent autre, et lorsque je fus en âge de comprendre que quelque chose n'allait définitivement pas et que le royaume allait toujours au plus mal, je me suis promis, un jour, d'y mettre un terme et d'abandonner mes chimères au profit d'une quête de paix pour le pays.
    Kazuo est mort, Natsume est le nouveau roi, j'aime Natsume... Tout semble aller pour le mieux dans cette logique, alors je suppose que j'ai en fait beaucoup de chance. Je n'ai plus à me soucier ni de l'un ni de l'autre puisque le tyran n'est plus et que la plus belle personne au monde vient de me faire une demande en mariage inespérée. Je suis juste troublé par tout ça, comme si je peinais à réaliser.
    Incertain aussi quant au comportement adopté, je suis bon en soldat mais prince, ce n'est pas un rôle que j'ai eu l'occasion d'emprunter, alors j'ignore si cela m'ira. Il n'a pas tort néanmoins quand il remet les choses en place. C'est vrai que, s'il avait voulu, il aurait très bien pu prendre pour époux.se n'importe quel.le prétendant.e qu'on lui proposait. La liste est longue et elle peut l'être davantage au bon vouloir de ceux qui veulent se faire une place importante auprès de la couronne. Pourquoi, au fond, serais-je plus nul que le reste ?
    D'autant plus que, comme il le dit, je ne pourrais pas supporter de le voir marier à un.e autre. Partager son lit avec un.e autre. Porter les enfants d'un.e autre. Plus il l'énonce, plus mes traits se déforment en une expression de dégoût tandis que des frissons désagréables dévalent mon échine.

    Mon amant me rassure. Il n'a pas honte. Il ne veut plus me cacher. Il veut dire à tout le monde que nous sommes unis dans un lien spécial qui ne peut être compris par personne d'autre. Il veut qu'on sache que nous sommes ensemble et que nous ne laisserons personne détruire cette relation, pas même les nobles qui se croient tout permis.
    Ma poitrine bat follement à ses aveux. A sa main sur ma joue et celle contre la mienne qui la serre davantage, alors que je plonge dans son regard.
    "Je souhaite un partenaire. Et je ne peux en imaginer d'autre."
    Qui ne rêverait pas d'entendre ces mots ? Mes yeux s'humidifient un peu à cet aveu qui démontre toute la tendresse qu'il éprouve pour moi. Cette tendresse qui m'honore, qui est bien trop pour un simple chevalier tel que moi. Je pourrais continuer de protester. Refuser humblement une telle proposition par pudeur et modestie, car je me montrerais arrogant et profiteur de confirmer. Mais je m'en fiche un peu, en fait, de ce que peuvent penser les autres. Il y a un fait qui me comble trop et qui éclipse le reste : Natsume m'aime et il veut m'épouser. Moi. Et personne d'autre. Je pense que rien ne pourrait me satisfaire et m'émouvoir davantage. Je ne pleure pas mais je suis à la limite, touché par ses mots qui signifient tellement. Comment dire non ? Je ne peux pas. Je ne veux pas. Mon sourire est revenu, sincère, attendri et encore un peu timide, mais heureux.

    « Alors... dans ce cas j'accepte. Moi aussi, je veux me marier avec vous. »

    Je ne pense pas à ce que cela signifie sur le papier, d'ailleurs. Pour l'heure, j'oublie même nos rangs respectifs. Je ne vois plus un roi, mais la personne que j'ai envie de chérir toute ma vie.

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    Il semble au moins que j'ai touché juste. Je reconnais à son expression qu'il ne compte pas protester plus que ça, et je crois déjà avoir ma réponse. Silencieux, je l'observe sans un mot, sentant toutefois mon rythme cardiaque s'accélérer brièvement devant son expression souriante. J'ai le privilège de l'observer plus souvent que d'autres mais elle reste rare malgré tout. Et, enfin, il me répond honnêtement. Ce sera donc lui, et personne d'autre. Tant mieux. Cela me retire une épine considérable du pied. Me soulage aussi. Cet secret permanent commençait à m'agacer, quand bien même la voie que j'emprunte s'annonce ardue. J'en reviens d'ailleurs bien vite à ces derniers, la mine pensive et les sourcils froncés, le regard se perdant sur le côté.

    « Je ne vous dis pas que ce sera facilement accepté. Mais... A vrai dire, je crois pouvoir obtenir le soutien de l'armée et du peuple là-dessus. »

    Après tout, quand j'y réfléchis, même si la haute-noblesse et la bourgeoisie s'indigneront de voir un petit noble choisi... Il y a de fortes chances que l'armée soit plus encline à discuter avec moi. Quant au peuple, même si c'est un jeu dangereux, je pense pouvoir jouer sur la carte du « sauveur » de notre dynastie. C'est risqué, cela dit, mais... Si cela fonctionne, ce sera particulièrement efficace. Et très amusant. Toutefois, je ne peux pas ignorer les risques.

    « Simplement... Il y a des chances d'une attaque le jour de la cérémonie. De fortes chances, même. »

    Un animal se sentant sur la fin se débat d'autant plus. Et j'aimerais éviter un accident, à vrai dire. Pourrions-nous les prendre à revers, au contraire... ?

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    Ce jour n'était pas attendu au tournant, de loin. Et pourtant, qu'aurais-je fait, effectivement, s'il s'était marié à quelqu'un d'autre ? S'il avait dû partager sa vie avec quelqu'un d'autre ? Je crois que je ne l'aurais pas supporté. Ou du moins... Très difficilement. Je ne l'aurais pas blâmé, bien sûr. En un sens, je demeure un peu plus libre que lui sur mes choix de vie, par exemple. A l'instar du conseil auquel j'avais assisté, j'ai bien remarqué comme son "entourage" pouvait être insistant et pressant. Ce ne sont pas des responsabilités faciles à porter et je l'admire pour supporter sur sa tête une couronne bien lourde de devoirs. Je me rassure toutefois de savoir que je pourrais être à ses côtés, et que personne ne pourra prendre ma place ; même pas officiellement où nous annoncerons, à tout le monde, notre union.
    Je ne m'attendais pas spécialement, comme il le dit, à ce que ça soit facile. Au contraire, je me doute que ça ne passera pas aux yeux de tout le monde et particulièrement à ceux qui pensaient grapiller une place fraîche auprès de la royauté. Ils devront se frotter à la petite noblesse que je suis ; et je sens que ce sera très satisfaisant à voir, d'observer leurs regards frustrés que je leur sois passé devant sans même le vouloir vraiment.
    Je ne doute pas au moins que l'armée nous soutiendra dans notre projet, comme il l'affirme. Beaucoup n'aimaient pas forcément Kazuo et je peux dire sans crainte que je ne suis pas trop impopulaire moi-même. Mais le père de Natsume n'a jamais vraiment su comment se faire apprécié des autres, de toute façon, hormis pour les malfrats qui adoraient se faire graisser les pattes et obtenir une fausse attention positive pour se donner l'air important auprès du roi.
    Je ne me fais pas d'illusion non plus quand il me dit qu'une attaque est possible. Je m'y attends également, ou du moins je ne suis guère surpris par cette mise en garde on-ne-peut-plus légitime. Mais je ne m'en soucis pas vraiment ; ou du moins, cela ne me fait pas peur. Et je suis motivé à ne pas les laisser déranger notre cérémonie.

    « Alors tout ce qu'il nous reste à faire, c'est de nous préparer. Je ne laisserai personne gâcher le plus beau jour de ma vie. »

    Ma main serre légèrement la sienne. Mon expression est tranquille, mais j'ai un sourire qui trahit mon impatience. J'ai confiance. Nous ferons le nécessaire afin d'avoir une belle fête. Et je sais déjà d'avance que le choix de ma tenue m'inquiétera davantage qu'une potentielle attaque.
    Plus joueur, je penche légèrement la tête vers mon amant pour lui caresser la joue du bout de mon index, un air amusé sur la figure.

    « Donc... Est-ce que ça fera de moi la reine ? »

    Reine Samaël... C'est pas trop mal non plus. Même prince. Je sens que c'est un titre qui pourrait bien m'aller.

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    Je réfléchis. Je ne compte pas renoncer à cause des menaces, comprenez bien, mais je... Nous devons tout de même prendre quelques précautions, disons. Cela nécessitera des préparations, effectivement, je hausse les sourcils quand il énumère un jour de cérémonie comme 'le plus beau jour de sa vie'. Je ne le savais pas si fleur bleue. Je n'aurais pas le même enthousiasme pour des célébrations, mais cela lui fait plaisir, tant mieux. Je laisse sa main se serrer contre la mienne, sentant des papillonnements agréables remonter dans ma poitrine en observant son expression. Ce qui n'est pas aidé, d'ailleurs, par le doigt qui se balade sur ma joue et son air joueur qui me tire quelques rougeurs. Je sais qu'il plaisante, mais je veux tout de même répondre sérieusement.

    « Prince, techniquement. Mais vous risquez de ne pas être le seul à porter ce titre, dans quelques mois. »

    Une moue plus joueuse sur le visage, je n'oublie pas que nous avons déjà sauté quelques étapes, à vrai dire. Ce qui m'amuse puérilement, d'ailleurs, bien que ces règles soient ridicules en soi. Ma grossesse est un secret mais elle n'aura pas plus raison de l'être bientôt ; c'est un embêtement de moins dans mes pensées. J'en ai encore un autre dans le coin de ma tête, d'ailleurs, mais il y a peut-être moyen de faire deux pierres d'un coup.

    « Mais je crois... Que ce sera aussi l'occasion de faire un peu de ménage. »

    Un sourire mêlant malice et amusement sur mes lèvres, je viens prendre son menton avec douceur pour l'embrasser. Je crois qu'il faudra que je prévois une tenue de rechange, au besoin...

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    Prince... Oui, prince, ce sera très bien. Je n'ai jamais espéré obtenir un tel rang. Je n'ai jamais vraiment eu d'ambitions par rapport au pouvoir, je voulais surtout être le meilleur chevalier possible. Mais ça sonne pas si mal, finalement. C'est ma mère, qui fera une drôle de tête, quand elle l'apprendra. Je mets du temps en revanche à comprendre ce qu'il veut dire par rapport au fait que... je ne serais pas le seul prince ? Je crois d'abord qu'il me fait une blague et qu'il veut me dire qu'il devra quand même prendre un autre "mari" pour simuler un faux mariage, mais je ne comprends pas car il voulait rendre le nôtre officiel. Il est sérieux, néanmoins. Puis, je me rappelle tout à coup ce qu'on a fait aussi il y a deux mois. On a tué son père, fait son couronnement, et...
    Oh.
    Il est tombé enceint. A cause de moi. Et ce fut une discussion un peu gênante quand Mikaël a confirmé qu'il y avait bien quelque chose qui se développait dans le ventre du nouveau monarque. A peine roi qu'il est déjà en cloque. A peine roi, à peine en couple avec lui que j'ai laissé mes désirs prendre forme. J'ai regretté après coup de le mettre dans une situation embarrassante, car un avortement était de loin quelque chose de fun. Je me suis inquiété. J'ai eu peur. Mais il ne m'en a pas voulu. Il m'a dit qu'il allait y réfléchir. Que j'avais changé sa perception de l'avenir qui, avant moi, demeurait bien sombre. Alors quand il s'approche pour m'embrasser, je reste immobile, même si je réponds tout de même à ce baiser qui réchauffe ma poitrine. L'élan d'émotions et d'euphorie me donnent envie de lui donner de l'affection et de l'attention, mais je demeure troublé par ce qu'il vient de m'annoncer.

    « Vous voulez dire... »

    A contrecœur, j'écarte un peu ma bouche de la sienne pour reprendre la parole, afin qu'il me confirme.

    « La grossesse... Vous voulez aller à son terme ? »

    Pas de jugement ou d'angoisse de ma part, je suis simplement surpris, et curieux aussi de savoir ce qui l'a mené à ce choix, finalement.

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    Il n'a pas l'air de saisir. Ou du moins, il est lent à la réaction, comme d'ordinaire. Je hausse les sourcils d'un air dubitatif, un peu désabusé au passage, me retenant d'un commentaire sarcastique qui ne serait pas de très bon goût. J'ai du mal à identifier la nature de sa réaction, d'ailleurs. Il semble plus surpris qu'autre chose. Attendait-il l'autre alternative ? En même temps, il n'a rien dit à ce sujet pendant des semaines. J'ai beau avoir cherché à obtenir son avis, je me suis retrouvé face à un mur. Enfin, non, pas littéralement, j'aurais préféré. La mine blasée, je ne peux pas m'empêcher de faire une pique à ce propos.

    « Eh bien, sauf si vous n'en désirez pas, oui. Mais il faudrait me le dire, à un moment. »

    C'est que le pain va bien finir par sortir du four, à un moment donné, alors il faut bien prendre une décision. De mon côté, maintenant que je n'ai plus à m'inquiéter des circonstances de cette grossesse et de l'accueil qui en sera fait, c'est une épine de moins dans mon pied. Je ne suis pas opposé en soi au fait d'avoir des enfants. En plus de ça, c'est un bel avantage stratégique qui tomberait à pic.

    « Par ailleurs... Je crois qu'il n'y aura pas meilleur moyen de vous introduire dans la famille royale et de fixer votre place.  »

    Si il y a des choses que le peuple ne tolère pas, c'est qu'on touche aux héritiers. Allez savoir pourquoi, si son avis peut être très tranché sur les monarques, les dauphin.e.s sont souvent exemptées de ces critiques. Parce qu'ils représentent le futur ou je ne sais quelle autre bêtise, mais tout de même. Cette affection s'étend aux parents consorts, quelque part, et je sais que la noblesse en a conscience. Les tentatives d'attaques seront moindres, ou plus risquées pour eux.
    J'éloigne mon visage du sien, croisant des bras et des jambes sur mon fauteuil, l'expression neutre.

    « Il n'y a plus de raison de le cacher ou de s'en inquiéter, maintenant. Sauf si vous avez une objection ? »

    Je le mets un peu devant les faits, mais je crois que je n'ai pas la patience que nous tournions éternellement autour du pot. Il faut qu'il me dise ce qu'il veut, car l'heure tourne, si je puis dire.

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    Ce n'est pas que je ne le désire pas. Pas du tout, même. Je suis simplement surpris, puisque nous n'en avons pas parlé ensemble depuis. Je me demandais s'il avait besoin de plus de temps, mais en même temps je me rends compte que le temps, on va en manquer, si nous tardons trop à nous décider. Mais vu son ton, je suis rassuré sur le fait qu'il semble sérieux à propos de sa décision, au moins. Et il trouve même un avantage à cette grossesse, même si cela me fait drôle de me dire que je vais... appartenir à la famille royale. Sa famille. Et que l'enfant qu'il porte... sera aussi le mien. Notre enfant. L'héritier déjà en marche. Je crois que je vais avoir du mal à m'y faire. Enfin, pas du mal dans le sens mauvais, mais ça me fera plus drôle que je ne l'imagine, sûrement. Mais je serais heureux que nous annoncions également cette nouvelle, bien sûr, et je rassure tout de suite mon compagnon, d'ailleurs, même si j'ai à présent les joues de nouveau rouge.

    « N-Non, au contraire ! Je suis très heureux, vraiment. Mais... Je voulais aussi votre avis, naturellement. C'est vous qui le portez, après tout. »

    Je me serais plié à sa décision. S'il avait voulu ne pas le garder, je l'aurais accepté et je l'aurais aidé du mieux que je pouvais. Mais s'il veut le conserver, alors j'assumerai entièrement ma responsabilité et... ce sera même avec plaisir que je le ferai.

    « J'ai... J'ai aussi quand même hâte de le voir, dans ce cas. »

    Plus timoré, mon regard se baisse vers le ventre de mon désormais "fiancé", qui n'est pas encore bien gros mais dont la rondeur ne saurait tarder à se voir.

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    Enfin, après un mois passé à attendre qu'il me dise si oui ou non il souhaiterait de l'enfant que je porte. Je soupire d'un air désabusé et vaguement agacé, me disant que, tout de même, il aurait pu me le dire directement avant plutôt que de refuser de se positionner. Je peux comprendre qu'il veuille mon avis, mais ça m'aurait épargné beaucoup de pensées inutiles et stupides. Mais bon. C'est fait. Tant mieux, si il en veut. Cela nous donnera du répit politiquement, en outre.
    Je relève un sourcil devant l'impatience qu'il exhibe. De mon côté, j'enjolive peut-être moins la réalité. Je ne retiens pas un roulement d'yeux et un sarcasme.

    « Ne vous impatientez pas trop, il vous retirera le peu de temps libre que vous aurez une fois sur le trône. »

    Je le plains quelque peu. Même si je ne souhaite pas suivre toutes les stupides traditions des Shimomura au sujet des consorts (qui ont un peu tendance à se voir dénués de tout pouvoir), je sais qu'il risque d'avoir les mains chargées d'ici peu. Surtout vu le peu de temps que nous aurons pour préparer la cérémonie. Et parlant de préparation, j'ai quelques petites idées à ce sujet.



    Le mois est passé vite. Très vite. La nouvelle du mariage à venir est officiellement sortie quelques jours à peine après notre entrevue ; et dès lors, les réactions fusèrent. Je crois ne jamais avoir vu un conseil qui aurait si facilement pu en venir aux mains. Ou avoir vu des teintes plus rouges que celles des visages pleins de colère ridicule à peine contenue : pour sûr, la nouvelle avait fait quelques remous. La noblesse et le clergé avaient vociféré comme des chiens enragés. Mais comme prévu et de son côté, l'armée avait particulièrement apprécié : je crois d'ailleurs que je ne les avais jamais vu aussi... Réceptifs, disons, à une approche de la famille royale. Et serviables. Très serviables. J'avais pris le temps d'en recevoir ses représentants, à part, à l'abri des oreilles. Nous sommes vite arrivés à un arrangement. Je n'ai eu qu'à leur garantir quelques babioles. Vraiment, qu'est-ce que c'est demandant, les préparatifs de mariage...

    Parlant de ça, d'ailleurs, le château fut en émoi tout le long du mois. Pour être tout à fait honnête, je me suis occupé de la corvée diplomatique, et c'était bien assez : j'ai laissé le reste aux domestiques et à mon chambellan. Enfin, à lui, et à mon futur époux à qui j'ai laissé carte blanche si il avait quelque souhait que ce soit. Contrairement à lui, les cérémonies ne sont pas ma tasse de thé. Rien que de passer quelques heures avec les couturiers pour que nous choisissions ma tenue m'a exaspéré. Alors en un sens, tant mieux, si il y prend goût.

    Mais la jour décidé est arrivé bien vite. Et mon ventre, petit à petit, a commencé à s'arrondir. Fort heureusement, grâce à la coupe de mes robes de cérémonie, il n'en semblera rien. Les manches longues et les largeurs du tissu autour de mes hanches me soulagent à ce propos. J'admets d'ailleurs que les artisans ont bien travaillé ; le tissu est fin et les couleurs ne sont pas criardes. J'avais des doutes, quand on m'a au départ proposé un mélange de rouge et de noir, mais il semble qu'ils aient eu raison. Tant mieux. Je ne voudrais pas donner mauvaise impression. J'ai même accepté qu'on peigne mes cheveux. Je ne le ferai pas tous les jours.
    La musique s'est enfin calmée. Le bruit des cors devenait un peu agaçant. Tout autour, les derniers invités terminent d'arriver et de prendre place. De nombreux regards se perdent sur la décoration, sur les fleurs et les tapisseries qui ornent murs, tables, portes et couloirs. Je serais presque dépité à l'idée que tout cela risque d'être bien tâché. Mais tant pis.

    Devant l'autel, j'attends. Mon regard s'arrête brièvement sur la couronne de ma mère, encore sur son piédestal. Il m'est étrange de la voir à nouveau, après qu'elle ait été rangée pendant si longtemps. Il est inutile toutefois de la laisser prendre la poussière quand elle sera plus utile ailleurs. Ou en l’occurrence, sur une autre tête. Ensuite, je jette un coup d’œil plus large à l'assemblée. Elle est large. Bien compacte. Bien organisée. Décider des places de chacun fut complexe, je dois l'admettre, mais cela en valait le coup. D'ici, j'entrevois très brièvement l'éclat de la lame d'un de mes soldats, cachée sous ses vêtements amples de cérémonie. Vraiment, les fêtes, ça a tout de même un bel avantage : réunir tant de monde dans une pièce fermée... C'est très pratique.

    Attentif et vigilant, il n'empêche pas, toutefois, que mon regard traîne vers le bout du couloir. Eh bien, il se fait attendre...


    Dernière édition par Segnif le Ven 28 Avr 2023 - 10:39, édité 1 fois

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    Qui aurait pu croire que les préparatifs de mariage étaient mon truc ? Pourtant, je suis bien investi dans celui que nous organiserons bien assez vite. D'autant plus normal qu'il s'agit du mien. Du nôtre. Et pas n'importe lequel : celui d'un roi et son futur prince. Première et dernière fois que j'en préparerai un, sans doute. Mais rien ne passe inaperçu à mes yeux et je vérifie chaque détail pour que tout soit parfait le jour J. Il m'a pourtant mis en garde : cela risque de finir en bain de sang. Cela ne me dérange pas. Rien n'échappe quand même à mon œil vigilant, que ce soit le banquet, la disposition des places, les décorations, le type de fleurs, les couleurs des bannières... Et évidemment mon costume fait sur-mesure exprès pour l'occasion. Je n'ai pas encore découvert celui de Natsume : je me garde la surprise pour quand je le verrai dans sa belle tenue. Le mien est en ensemble qui fait bien... "princier" pour le coup, dans des tons blancs et bleus afin de contraster avec le seul élément que je sais des vêtements de mon amant : rouge et noir. Ces nuances reflètent nos personnalités : nous sommes différents et pourtant nous nous complétons bien. Il est élégant alors que je suis rude. Il est technique quand je suis pratique. Il est stratégie quand je suis action.
    Lorsque ma mère a été mise au courant, elle a cru à une plaisanterie. Je lui ai toutefois révélé toute la vérité : premièrement qu'elle aurait un gendre, deuxièmement que ce serait le roi, et troisièmement qu'elle serait grand-mère. Toutes ces informations soudaines lui ont fait un petit choc, mais une fois que la réalisation avait fait son bout de chemin, elle fut la plus comblée de toutes les mères. Et même si nous n'avons jamais été pauvres, je lui ai promis, si elle le souhaite, un espace privilégié au château. Mais elle avait, tout comme moi, hâte à la cérémonie.

    C'est bien sûr toutefois avant de faire mon entrée en scène que je me mets à paniquer. A être nerveux. Agité. Un peu paniqué, aussi. Et si notre plan ne marchait pas ? Si nous faisions un pas de travers ? Si je faisais n'importe quoi ? Si au final il changeait d'avis ? Et j'aurais pu continuer encore longtemps avant que mes pensées ne soient interrompues par les serviteurs qui m'ont pressé de me dépêcher. Moi qui étais tout fier de mon costume, je me trouve ridicule au dernier moment. L'idée de me changer complètement me traverse, mais je dois y résister. C'est trop tard pour faire marche arrière et c'est à moi de venir. Déjà que j'ai pris "un peu" de temps pour me préparer...
    Mon bouquet de fleurs en main, j'ai tenu aussi à avoir sur mon visage un voile transparent, rien que pour la satisfaction de voir Natsume me le soulever. J'ai bien le droit à des caprices spécifiques, non ?
    Respire un bon coup.
    Je me rappelle des conseils que m'avaient prodigué ma mère avant de me laisser terminer seul pour rejoindre les bancs devant l'autel. Autel auquel je dois désormais accéder. Lorsque les portes s'ouvrent pour dévoiler la fameuse allée le long de laquelle se dresse un tapis censé m'accueillir, mes yeux se relèvent timidement vers mon fiancé. Oui, moi le chevalier qui a désobéi aux ordres de son ancien souverain pour mieux l'assassiner et qui n'hésite jamais trop à tremper ses mains dans le sang, me voilà tout flagada pour une simple cérémonie. Mais quand je pose mes yeux sur mon futur époux, je sens mon cœur défaillir. Il dégage une beauté et un charme sans pareils, et je ne peux m'empêcher de détailler les moindres coutures de ses vêtements qui tombent majestueusement sur lui. Les joues chaudes, un sourire timoré et transi, je me laisse emporter par la musique qui s'est mise en marche en même temps que moi, le temps d'arriver au niveau de l'autel où je me tourne vers Natsume. J'évite de trop regarder la couronne qui m'est destinée pour le moment car elle me rend étrangement nerveux, comme si je ne me rendais pas encore tout à fait compte qu'elle va être posée sur ma tête. Comme si j'attendais qu'une véritable reine se manifeste alors qu'il m'a bien fait comprendre qu'il ne désirait personne d'autre. Parlant de désir, ma poitrine ne s'est toujours pas calmée, et je sens que j'aurais bien du mal à détourner les yeux de lui, finalement. Je me penche vers le Shimomura, ne tenant pas plus longtemps avant de lui glisser des petits mots à l'oreille pour que lui seul puisse entendre.

    « Je ne sais pas si je préfère que vous gardiez ces vêtements ou si j'ai hâte de vous les enlever. »

    Je tiens absolument à ce qu'il sache quel effet il provoque en moi. Sa tenue est si raffinée qu'elle n'a pas sa place autre part que sur son corps, et pourtant j'ai hâte aussi de le débarrasser de ces couches de tissus qui m'empêchent d'accéder à son épiderme.


    Dernière édition par Samalo le Ven 28 Avr 2023 - 23:44, édité 1 fois

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    Entendez, je trouve tout ça bien dramatique, mais... Cela avait l'air de lui faire plaisir. Je lui laisse sa musique et ses petits accessoires si cela le met de bonne humeur, car j'ai vu à quel point toute cette cérémonie tendait à l'angoisser. Je trouve ça assez amusant, d'ailleurs, qu'il soit aussi timoré et angoissé pour des broutilles de ce genre ; contrairement qui ait davantage tendance à voir tout cela comme une formalité plus qu'autre chose.
    Devant l'autel, je l'attends en gardant le dos tourné. J'attends que la musique soit arrivée à son terme et que j'entende des bruits de pas à côté de moi pour finalement porter mon attention vers la silhouette à côté de moi. J'admets avoir un moment d'arrêt, pris par surprise. J'ai l'habitude de le voir en armure imposante, entouré d'acier et une arme à la main ; les vêtements fins, c'est assez nouveau. Et quelque part, je trouve ça intimidant, sûrement car cela concrétise d'autant plus ce qui est en train de se passer. Ma gorge se serre un peu, d'une fébrilité que je ne me connaissais pas. Je ne suis pas encore habitué à ces battements rapides dans ma poitrine quand je le regarde de trop près, parfois, comme maintenant. Un effet quelque peu cassé, je l'admets, par son aveu à voix baisse auxquels je ne réagis pas en surface, passé depuis longtemps maître dans l'art de l'indifférence apparente. Mes joues prennent toutefois de légères teintes rosées. Je me contente, en silence, de relever son voile quand bien même je n'en saisis pas l'intérêt. Dans un murmure dont le ton est à demi désabusé mais amusé malgré moi, je me contente d'une réponse courte.

    « Je suis flatté, mais vous aurez l'occasion de vous décidez si nous survivons, déjà. »

    Disons qu'il y a plus pressant, si je puis m'exprimer ainsi ; et je crois d'ailleurs, du coin de l’œil, voir quelques éclats d'argent ici et là. Je me doutais que cela se passerait ainsi, à vrai dire, mais je ne croyais pas que ce serait si rapide. J'entends, au bruit de l'acier, des dagues quitter des fourreaux. Je ne retiens pas un roulement d'yeux et une expression désabusée en voyant des silhouettes encapuchonnées se révéler.

    « Eh bien, je vois que vous avez ramené quelques invités surprises. »

    J'entends le bruit dans la foule. Des murmures, des coups d’œil inquiets, d'autres plein d'arrogance. On avait supposé qu'en réalisant cette cérémonie à huit-clos, nous essayions de tempérer les mécontentements. Qu'en n'invitant que la noblesse et quelques hauts représentants, nous souhaitions nous accorder leur faveur. Disons plutôt que j'ai toujours vu l'attrait d'un piège bien préparé. Volontairement, nous avions laissé des failles évidentes dans la sécurité pour que des assassins s'y engouffrent : le pot à miel était trop tentant. Et maintenant, les insectes sont là.
    Derrière, je vois les portes qui se ferment, sous les mains « d'invités » habillés comme des civils quelconques. D'autres du même genre, dans l'assemblée, dégainent de fines épées dissimulées sous leurs capes. La garde n'a pas été longue à être convaincue ; qu'on touche à leur Général ne leur plaît pas particulièrement. Alors que les armes commencent à se montrer et que le programme s'inaugure agité, je ne peux retenir un commentaire en direction de mon fiancé, mon expression se parant d'une moue désabusée et joueuse.

    « J'aurais dû vous dire que le blanc était à éviter, aujourd'hui. »

    Ma main, lentement, commence à laisser échapper quelques cristaux de glace. C'est un peu dommage pour nos tissus, mais bon... Heureusement que j'avais prévu un double...

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    Contrairement à moi, il se peut que Natsume ait surtout considéré la cérémonie non pas pour ce qu'elle est mais plutôt pour ce que nous avions supposé qu'il s'y passerait. Et si je suis impatient d'en découdre, je mentirais si je disais que je n'étais pas déçu de l'issue de ce mariage pour aujourd'hui. J'aurais voulu que ce jour soit propice à une fête en notre honneur, pour célébrer une union que nous avons fait taire pendant des mois avant de pouvoir l'assumer. Un banquet somptueux où tout le monde était invité. Des danses et de la musique afin de faire la fête comme il se doit. Et si j'ai l'espoir, pendant un instant, qu'il ne se passe en fait rien de dramatique, je remarque ici et là des armes et des suspects dans des coins de la salle qui me font soupirer intérieurement. Et lorsque Natsume donne le signal et que les malfrats se départissent enfin de leurs déguisements, un autre genre de "fête" peut commencer.
    Un soupir m'échappe avant que je ne dégaine ma propre épée lorsque les assassins venus pour nous se précipitent sur leurs cibles couronnées (enfin presque, puisque je n'ai pas encore ma couronne). Le premier a le droit a un coup dans le visage qui le fait tomber par terre avant que je ne l'étrange avec mon voile que j'ai retiré. Mais les autres viennent à leur tour, visiblement jaloux du sort que je réserve à leur camarade. Si mes yeux ne peuvent s'empêcher de se détourner brièvement pour apercevoir mon amant en coin afin de juger de sa position, je constate que les éclats de glace qu'il a fait apparaître font bien l'affaire contre ses opposants. Et oui, j'aurais dû ne pas me ramener en blanc car nous n'allons pas vraiment repartir d'ici les mains propres, mais je tenais quand même à mon caprice ; et je dois avouer que, pour le coup, s'il faudra qu'on me confectionne de nouveaux habits après cette journée, qu'il en soit ainsi !

    « Mettez les civils en sécurité ! »

    Des soldats s'assurent que les quelques innocents réunis repartent d'ici sans encombre par une trappe secrète. Cela ne devrait pas poser trop de souci, mais je m'inquiète quand même pour ma mère et me dirige vers elle afin de m'enquérir de son état.

    « Samaël, que se passe-t-il ?
    - Oh, trois fois rien. Juste... Quelques jaloux qui auraient rêvé d'être à ma place. »


    J'en tue d'ailleurs un en lui transperçant les poumons, pendant que ma génitrice se place derrière moi, peu rassurée.

    « Va te mettre à l'abri. Suis les soldats, ils te mettront en lieu sûr. »

    Je la sens incertaine et un peu apeurée, mais elle m'écoute au moins et se hâte de rejoindre les chevaliers qui s'occupent de l'évacuation. De mon côté, maintenant que les civils sont plus ou moins hors de danger, je décoche aux rebelles un regard noir en jouant un peu avec ma lame.

    « Vous auriez pu choisir un autre moment, quand même. Gâcher nos épousailles... »

    Je n'en ai pas forcément l'air, mais je suis furax. Nous avions prévu le coup. Nous savions que cela pouvait arriver. Que cela allait arriver. Est-ce que pour autant cela rend la chose plus acceptable ? Pas pour moi. J'avais hâte à cette cérémonie. J'ai tout bien préparé, tout bien organisé, j'étais vraiment heureux que nous nous marions... Et puis il a fallu qu'ils viennent mettre le foutoir. J'vous jure... Cela me met hors de moi.
    Peut-être un peu trop, d'ailleurs. Je ne fais plus vraiment attention à ceux qui passent sous mon nez pour tenter de me tuer, me débarrassant d'eux à la seconde où ils s'approchent un peu trop près de moi. Ils l'ont cherché. Mon arme a soif de sang. Elle blesse, tue, enlève un membre ou deux, tranche avec précision et rapidité.
    Un assassin veut s'en prendre à mon roi de dos. Alors qu'il préparait son mauvais coup en traître, je n'attends pas longtemps avant de viser pour planter mon épée dans son dos et ainsi l'achever d'une traite. Je me rapproche de Natsume en récupérant ensuite ma lame.

    « S'ils réagissent comme ça pour un mariage, j'ai hâte de leur annoncer la grossesse. »

    Et, maintenant que j'y pense, j'ai sans doute un peu peur que tout ce remue-ménage ne soit pas bon pour le fœtus, aussi petit soit-il.

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    Sans doute devrais-je être plus ému que ça, mais c'était parfaitement prévu, après tout. L'oeil à moitié agacé seulement, je dois admettre qu'une part de moi est étrangement satisfaite. Tout se passe exactement comme imaginé, à la lettre près. Enfin, pas exactement, il est vrai. Je ne m'attendais pas particulièrement à voir mon fiancé étrangler quelqu'un avec son voile, mais la créativité de l'acte me tire un haussement de sourcils impressionné. Je ne cille même plus, maintenant, de voir ces corps tomber les uns après les autres. Cela n'aurait pas été le cas il y a quelques mois à peine. J'ignore quand cela a changé et à vrai dire, je m'en fiche.
    J'ai mieux à faire ; comme, par exemple, faire surgir de longs pics de glace du sol pour qu'ils viennent s'embrocher dans des cous. Pendant que la garde fait sortir les quelques civils rassemblés, mon œil ne reste jamais loin de la silhouette armée à mes côtés. Je vérifie brièvement que sa mère quitte les lieux sans heurt, prenant la peine de faire claquer la porte grâce à une vague de givre pour qu'elle ne bouge plus. Contrairement à lui, d'ailleurs, je ne suis pas si agacé ; j'ai davantage l'impression de faire un ménage bien nécessaire plus qu'autre chose. Et ces crétins de nobles pompeux qui n'osent pas se rapprocher des sorties bien gardées... Tiens, je crois qu'ils sentent le vent tourner.

    Roulant des yeux, je claque du pied pour que laisser des traînées de glace se répandre au sol et faire chuter les assaillants qui nous approchaient ; et mon amant termine le travail de son côté, bien que je le sente quelque peu tendu, je dois l'admettre. Eh bien, cela lui fait de l'exercice physique pour se défouler, ce n'est pas plus mal. Bon, les membres qui chutent et le sang qui commence à draper le sol n'est peut-être pas la moins salissante des décorations, mais on ne peut pas tout avoir. Au pire des cas, la salle de l'autre aile sera bien suffisante...
    Mes gestes sont devenus presque mécaniques. Je ne fais presque plus attention à ce que je fais, n'agissant plus que par réflexe et par instinct. Mon seul moment de réflexion vient quand je prends la peine de soulever un pan de mes robes pour lui épargner d'être souillé par une flaque de sang plus profonde que les autres. Je n'ai pas l'habitude d'user de tant de magie en une journée, mais au fur et à mesure, je crois que même l'air s'est rafraîchi autour de nous. Mes lames de givres immobilisent, percent et traversent des corps que je ne cherche même plus à identifier. Je n'en ai pas l'occasion, de toute manière, le cœur battant, tentant d'oublier le fait que mon corps me semble bien moins endurant que d'ordinaire. Serait-ce à cause du parasite qui m'ote un peu de mes forces ? Sans doute. Sans doute est-ce pour ça, d'ailleurs, que j'ai cet instant de faiblesse qui me fait oublier de regarder derrière moi, à cet instant. Et lorsque j'entends un bruit de chair tranchée dans mon dos, j'ai le réflexe de me tendre, comme si je craignais que le coup ne me soit porté. Mais non. En me tournant, je vois un corps qui tombe, et la silhouette de mon amant, juste devant. La vision est familière. Mon regard, durant une seconde, se perd sur son épaule droite.
    Ça ne doit plus arriver.

    Mon expression se fait plus sérieuse. La salle s'est vidée, petit à petit, et ne reste plus que quelques têtes que je trouve bien blanches, soudainement. Devant les portes et autour de nous, la garde attend, immobile et silencieuse. Face à la plaisanterie de mon partenaire, de mon côté, je me contente de hausser les sourcils. Eh bien, j'ai une autre vision, disons.

    « Je ne suis pas exactement sûr qu'ils seront encore là pour l'entendre. »

    Je n'ai pas l'intention de perdre du temps, d'ailleurs. Autant en finir, je n'aime pas tourner autour du pot. Je redresse la main sans un mot, et je n'ai pas besoin de tourner la tête pour reconnaître le bruit de carreaux d'arbalète qu'on positionne. Toutefois, je ne donne pas mon signal tout de suite. Au lieu de cela, je me tourne sur le côté, essuyant ma main libre sur le piédestal, quoique elle est moins tâchée que celle de mon compagnon. Un sourire satisfait au visage, je finis par me saisir de la couronne qui est restée là, depuis tout à l'heure, intacte et intouchée.
    Je ne jette qu'un long regard à Samaël pour qu'il comprenne ce que je j'attends de lui et ne se mette à genoux. J'entends des complaintes et des suppliques, plus loin, mais je ne les écoute même pas. Mes deux mains viennent porter jusqu'à la tête de mon amant le couvre-chef qui lui revient, enfin. Les anneaux attendront tout à l'heure.

    « Debout, maintenant, votre altesse. »

    Ce n'est pas un ordre, cela dit. Je n'ai plus à lui en donner, maintenant, techniquement. De ma main gauche, je l'aide à se redresser, mais mon ambition est toute autre, je l'avoue ; car je la fais glisser le long de sa taille de manière à l'amener tout contre moi, collé contre mon corps. Mes lèvres se posent contre les siennes au moment même où ma seconde main s'abaisse. Et j'entends, presque à la seconde d'après, le bruit des carreaux qui percent des corps. J'ai toujours trouvé ça démodé, les cloches, de toute façon...

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    L'odeur du sang monte peu à peu dans la pièce. J'en serais écœuré si je n'étais pas habitué, depuis le temps, à une odeur aussi âcre. Ce n'est pas non plus ma préoccupation première, alors j'ignore les senteurs d'hémoglobines pourtant criantes. Ne reste plus que lui dans mes pensées. Mon amant. Mon fiancé. Mon époux. Mon roi. Roi bien particulier, d'ailleurs, d'abattre autant de ses "sujets". S'ils avaient été loyaux, cela ne leur serait pas arrivé, alors ils ne peuvent s'en prendre qu'à eux-mêmes. Si je pensais d'ailleurs qu'il ne tenait plus qu'à nous d'en finir une bonne fois pour toutes, Natsume a une autre idée en tête. Mon regard se détourne de lui alors qu'il s'approche du piédestal où se trouve toujours la couronne qui était censée m'être donnée. Avec surprise, je vois le Shimomura s'en emparer. Et si je ne comprends pas bien ce qu'il veut faire, je finis par m'exécuter à sa demande silencieuse et me met à genoux sans protester. Quand il me donne un ordre, j'ai pour habitude d'obéir sagement, de toute façon.
    Le poids soudain sur ma tête me fait me tendre un court instant, peu accoutumé. Ça y est, elle est sur ma tête. "Altesse". Le titre me fait très étrange. Je suis celui qui prononça ces mots tous les jours pour m'adresser à Natsume lorsqu'il n'était encore qu'un prince, jusqu'à ce qu'il me demande de l'appeler par son prénom. Je suppose que maintenant, nous sommes... vraiment égaux officiellement ? Mais je pense que mon côté militaire ne disparaîtra pas vraiment. Qu'il me faudra du temps pour me faire à mon nouveau titre, comme je l'avais prévenu à ce sujet déjà.
    Sans me douter de son projet, il m'aide à me relever, la main tendue. Mais lorsque je lui confie la mienne, je sens sa force me tirer et ses lèvres me happer en un rien de temps. Etonné, je m'immobilise sur le moment, avant de me détendre. J'entends au son des arbalètes que les flèches ont finalement été tirées. Tous ceux qui complotaient contre nous sont morts. Je me permets de me détendre à cette pensée, lui rendant son baiser même si mes joues se sont mises à chauffer face à son audace. Mes paupières papillonnent. Mon visage est brûlant.

    « J'espère que... vous aurez autant de fougue pour notre nuit de noces. »

    Je n'ai même pas pu sauver nos jolies tenues. Si les tâches sur la sienne ne détonnent pas trop, je ne peux pas en dire autant. Et oui, du blanc n'était pas la meilleure idée, mais je ne regrette rien pour autant. Et si l'endroit avait été plus propice et si nous avions été tranquille, j'aurais formulé mon souhait de tout à l'heure et je lui aurais débarrassé de sa tunique. Pour l'heure, il faudra faire un peu de ménage et rassurer les autres invités que le massacre est terminé et que nous pourrons faire la fête comme il se doit, cette fois. Je n'ose toucher à la couronne sur ma tête et pourtant une question un peu bête sort d'elle-même lorsque j'en caresse les bords de mes doigts non ensanglantés.

    « Est-ce que... Est-ce qu'elle me va bien ? »

    Je me suis soucié de bien peu de choses, pendant que j'égorgeais nos ennemis tout à l'heure. A présent, je reviens à des inquiétudes légères et futiles qu'on serait surpris d'entendre de ma part. Je me le permets. Nous pouvons souffler un peu.

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